À Tripoli, la vie a repris un cours presque normal
15 février 2012Tout a repris dans Tripoli. La vie normale, les commerces, les écoles... Et tout cela, étonnamment, sans sentiment d'insécurité. Très peu de policiers pourtant dans les rues, pas d'armée. Dans un pays qui a quand même connu huit mois de guerre.
Une guerre qui aura permis un vrai changement, une vraie révolution estime Mohammed, un touareg originaire du Mali :
« Tout a changé pour moi. Actuellement, j'attends un bébé et je peux lui donner un nom berbère. Avant, c'était interdit. Le premier témoin que la Libye a changé c'est que je suis avec toi actuellement, avant c'était interdit de parler à un étranger. »
Toujours des armes en circulation
Tout n'est certes pas rose dans le pays. Les katibas, ces brigades qui ont conduit à la chute du régime, ne veulent pas rendre les armes. Il n'y a pas encore assez de stabilité, expliquent les rebelles. Et parfois, des tirs sont échangés, des personnes tuées dans des règlements de comptes. Le Conseil national de transition semble un peu dépassé. Rien d'inquiétant à cela, estime Amani el-Ogbi, une jeune architecte :
« C'est normal, ce sont des conflits qui font suite à une guerre. Il y a eu un changement de pouvoir, c'est une période de transition. Il faudra du temps. Pas un jour, pas une semaine, mais plusieurs mois pour revenir à une situation normale. Moi, ce que je vois, c'est que les enfants retournent à l'école, les gens au travail. Ils veulent retrouver leur vie normale. »
Ils vivent dans la peur
Retrouver une vie normale, certains y aspirent sans pouvoir y parvenir. Tawargha est une ville proche de Misrata réputée pour avoir soutenu le régime de Kadhafi. Depuis la fin de la guerre, ses habitants subissent les actes de vengeance des rebelles de Misrata. Tawargha est aujourd'hui une ville fantôme. Certains ont trouvé refuge dans un bâtiment près de Tripoli. Il y a quelques jours, des hommes armés sont venus tuer plusieurs d'entre eux.
Anissa et Mesaoud, un couple de Tawargha, ont quitté leur ville en août dernier avec leurs deux enfants. « Kadhafi est mort. Il faut oublier le passé, se réconcilier, tourner une nouvelle page », estime Mesaoud. « Ça suffit, le passé est le passé. Il faut tourner la page maintenant ! On s'attendait à ce que le changement soit pour le mieux, pas pour le pire. Mais là notre situation est de pire en pire ! », se désole quant à elle Anissa.
Il faudra du temps pour cette réconciliation entre des Libyens qui ont été manipulés par celui qui, même mort, continue de semer la discorde.
Auteur : Thibaut Cavaillès (Tripoli)
Édition : Marie-Ange Pioerron