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L’Union africaine dit non au coup d'État au Soudan

11 avril 2019

L'Union africaine a fustigé la destitution, par l'armée, du président soudanais Omar el-Béchir. Les Etats-Unis et cinq pays européens demandent eux une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU.

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Sudan Militär und Demonstranten in Khartoum
Image : Getty Images/AFP

"La relève militaire n’est pas la solution" (Ebba Kalondo, UA)

Après les événements historiques au Soudan ce jeudi, le président de la Commission de l’Union africaine estime que "la prise de pouvoir par l'armée n'est pas la réponse appropriée aux défis auxquels est confronté le Soudan et aux aspirations de son peuple". C’est pourquoi, poursuit-il, le Conseil de l'UA pour la paix et la sécurité va se réunir "rapidement pour examiner la situation et prendre les décisions appropriées".

Lire aussi → Moment historique au Soudan - Revivez la journée de jeudi en direct

Moussa Faki Mahamat appelle aussi "toutes les parties concernées à faire preuve de calme et de la plus grande retenue et à respecter les droits des citoyens, les ressortissants étrangers et la propriété privée dans l'intérêt du pays et de son peuple".

Enfin, il exhorte toutes les parties à "s'engager dans un dialogue inclusif pour créer les conditions qui permettront de satisfaire les aspirations du peuple soudanais à la démocratie, à une bonne gouvernance et au bien-être, et de restaurer l'ordre constitutionnel dès que possible".

Dans une rue de Karthoum ce jeudi onze avril
Dans une rue de Karthoum ce jeudi onze avrilImage : pictur- alliance

Réactions

Les meneurs de la contestation, qui rejettent  le coup d'Etat de l'armée, promettent de poursuivre les manifestations. Selon l'Alliance pour la liberté et le changement, "le régime a mené un coup d'Etat militaire en présentant encore les mêmes visages (...) contre lesquels notre peuple s'est élevé". Et d'appeller le peuple "à continuer son sit-in devant le quartier général de l'armée (à Khartoum) et à travers le pays".

Selon Boubacar Mossi, membre du bureau politique du parti Moden Lumana Fa, de l'opposant Nigérien Hama Amadou en exil en France, "toutes les fois que vous voulez régner par la force, l'injustice, le mépris des autres, vous avez un temps. Il n’y a que le pouvoir divin qui est éternel. Vous ne pouvez pas éternellement régner dans la dictature. Imaginez un grand courant d'eau qui vient se bloquer face à un mur. Tant que le courant continue, le mur finira forcément par s'effondrer."

À l’étranger, l’Egypte, voisine du nord du Soudan, se dit "confiante dans la capacité du peuple et de son armée" à gérer l'après Béchir.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a pour sa part émis l'espoir de voir le Soudan renouer avec un "processus démocratique normal".

Réunion d’urgence à l’ONU

L'Allemagne, quatre autres pays européens et les Etats-Unis, demandent une réunion du conseil de sécurité à huit-clos
L'Allemagne, quatre autres pays européens et les Etats-Unis, demandent une réunion du conseil de sécurité à huit-closImage : Getty Images/AFP/J. Eisele

Quelques heures après la destitution du président Soudanais, les Etats-Unis et cinq pays membres de l'Union européenne (l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, la Belgique et la Pologne) ont demandé une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU qui va plancher sur la situation au Soudan. De bonnes sources, cette réunion à huis clos devrait se dérouler ce vendredi douze avril à New-York.

L’embarras de Guterres

Dans un communiqué, le secrétaire général de l'ONU a exigé que la transition au Soudan respecte le désir de démocratie des Soudanais. Antonio Guterres "réitère son appel au calme et à la plus grande retenue de tous".

Récit d’une chute

Après 30 ans de règne à la tête du Soudan, le président Omar Hassan el-Béchir a été donc destitué ce jeudi matin par l’armée qui l’a placé en détention dans un lieu sûr. Dans la foulée, un conseil militaire a été institué pour une transition de deux ans. À l’aube, la télévision nationale a interrompu ses programmes pour faire état d'une "importante annonce des forces armées sous peu".

Vers la fin de la matinée, le ministre de la Défense qui est devenu le nouvel homme fort du pays confirmait la destitution du président et annonçait plusieurs autres décisions. "J'annonce également la formation d'un conseil militaire de transition pour les deux ans à venir. La Constitution de 2005 est également suspendue et l'état d'urgence instauré pendant trois mois, le couvre-feu pendant un mois, entre 22 heures et 4 heures. Par ailleurs, j’annonce la fermeture de l'espace aérien pendant 24 heures ainsi que de tous les points d'entrée au Soudan, jusqu'à nouvel ordre."

Aussi, un cessez-le-feu a été décrété à travers tout le pays, précisément dans le Darfour à l'ouest, frontalier au Tchad. Peu avant, dans la journée, l'agence officielle Suna a annoncé la libération de tous les prisonniers politiques par les services de renseignement.

Pression de la rue

Les manifestations durent depuis plusieurs mois, ici en décembre
Les manifestations durent depuis plusieurs mois, ici en décembreImage : picture-alliance

La destitution de l’ancien président Omar el-Béchir est la conséquence des manifestations qui ont débuté le 19 décembre à la suite des mesures sociales prises par le régime déchu. Ces manifestations se sont intensifiées depuis le samedi six avril avec pour leitmotiv le départ du pouvoir d’Omar Hassan el-Béchir.

Babacar Justin Ndiaye (politologue) : "Je croyais le régime beaucoup plus robuste".

"Je croyais le régime beaucoup plus robuste. Les craquements ont été entendus depuis un certain temps. Les fissures étaient aussi observées, notamment entre l'armée, les services de renseignement et la police. En revanche, un affaissement aussi brutal n'était pas vraiment prévisible," s’étonne le politologue sénégalais Babacar Justin Ndiaye.

CPI

Selon le secrétaire général de l'ONG d'Amnesty International, Kumi Naidoo, "les autorités soudanaises devraient à présent remettre Omar el-Béchir à la Cour pénale internationale afin que les victimes de ces crimes innommables puissent voir que justice est rendue".

"Les autorités militaires soudanaises doivent veiller à ce que les lois d'urgence ne portent pas atteinte aux droits des personnes", a ajouté Kumi Naidoo qui a demandé aux  instances de transition à "prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter un transfert pacifique du pouvoir au Soudan.

Lire aussi → L'armée, éternelle arbitre des contestations populaires en Afrique

Le président déchu est sous le coup de deux mandats d’arrêts internationaux depuis 2009 lancés par la Cour pénale internationale (CPI).

DW MA-Bild Eric Topona
Eric Topona Journaliste au programme francophone de la Deutsche WelleETopona