L'Europe: pas la seule destination de la migration africaine
30 avril 2015Dans le débat sur la migration africaine, certains aspects sont rarement abordés, relève la FAZ, la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Pour expliquer les raisons de ce flot d'immigration en provenance d'Afrique on parle surtout de misère économique, de pression démographique et de répressions politiques. Mais la politique migratoire à l'intérieur même du continent africain, elle, est rarement citée comme raison. Or, la migration vers des pays pauvres n'est pas moins forte que la migration provenant de pays pauvres vers des pays plus riches, relève le journal qui s'appuie sur des études de chercheurs du réputé Institut sur la Migration Internationale d'Oxford.
D'un côté, une instabilité politique et économique augmente certes la pression migratoire. De l'autre, elle empêche aussi souvent des chefs de familles d'émigrer par ce qu'ils croient mieux pouvoir protéger les leurs s'ils restent dans le pays. Le rôle de régimes répressifs doit être également considéré de manière plus différenciée. De tels régimes ne provoquent pas seulement des vagues d'émigration; souvent, les restrictions qu'ils imposent obligent les candidats à l'émigration à renoncer à leur projet. Déjà à l'époque de la décolonisation, de nombreux Etats africains considéraient la limitation de l‘immigration comme un moyen de démontrer leur propre souveraineté. C'est pourquoi ils se sont parfois montrés extrêmement durs vis-à-vis des immigrés. Ainsi, depuis 1958 plus d'une quinzaine de pays africains ont pris des mesures radicales et, à mainte reprise, ont expulsé massivement des immigrés de pays voisins. La FAZ évoque ainsi un net durcissement des règles d'immigration dans la plupart des pays africains au cours des dernières décennies.
Par ailleurs, le journal constate que si les migrants à l'intérieur du continent sont souvent les plus pauvres, ceux qui viennent vers l'Europe proviennent le plus souvent de pays qui se portent mieux sur le plan économique, avec un haut niveau d'urbanisation et de mobilité. L'éditorialiste conclut avec l'un des constats de l'étude réalisée par les chercheurs britanniques: la proportion d'émigrants africains qui fuient des persécutions politiques ou des conflits violents ne représente que 14%."
Autre thème: le cas d'Onesphore Rwabukombe
Onesphore Rwabukombe, c'est ce Rwandais qui, en 2014 , vingt ans après le génocide donc, avait été jugé en Allemagne par la Haute Cour régionale de Francfort. Condamné à 14 ans de prison pour complicité, il s'était pourvu en cassation. Cette semaine la plus haute instance juridique allemande, la Cour Fédérale à Karlsruhe doit examiner le bien-fondé de cette sentence.
Le quotidien de Berlin Der Tagespiegel rappelle qu'Onesphore Rwabukombe , l'ancien maire de Muvumba, dans le nord-est du Rwanda, avait été jugé coupable d'avoir ordonné et coordonné un massacre commis en avril 1994 à Kiziguru par des soldats, des policiers rwandais et des miliciens hutus au cours duquel ont péri plusieurs centaines de Tutsis qui s'étaient réfugiés dans une église.
En 2014, le Parquet fédéral avait requis la réclusion à perpétuité, la défense avait demandé l'acquittement. Après trois années d'un procès complexe avec l'audition de près de 120 témoins, la lecture d'une centaine de documents et le visionnage de nombreux films, Onesphore Rwabukombe avait donc été condamné à 14 ans de prison. En Allemagne, ce verdict contre un génocidaire rwandais avait marqué une première. Onesphore Rwabukombe, âgé aujourd'hui de 58 ans, avait demandé et obtenu l'asile en Allemagne en 2002 .
Certains se demandent si un ex-politicien rwandais peut-être jugé par un tribunal allemand pour des crimes commis à 9500 km de distance, au Rwanda, il y a plus de vingt ans? Oui il peut! assure Der Tagesspiegel, car il n'y a pas de prescription pour meurtre, et pour un génocide, vaut le principe de la compétence universelle. La Haute Cour de Karlsruhe doit maintenant trancher définitivement sur le sort d'Onesphore Rwabukombe…