La diplomatie algérienne à la manœuvre en Libye
31 janvier 2020En proposant de réunir à nouveau sur son sol, les protagonistes de la crise libyenne, Alger veut sans doute garder la main sur ce dossier, avoir son mot à dire sur la crise que traverse un pays avec lequel il partage 1.000 kilomètres de frontière.
L’Algérie est consciente qu’un enlisement de la crise libyenne pourrait à long terme, déstabiliser une grande partie de la région.
Pour Jalel Harchaoui, chercheur à l’Institut des relations internationales de Clingendael (Pays-Bas) et spécialiste de la Libye, "l’Algérie est plus inquiète du sort de la Tunisie que de son propre sort à elle. Ce n’est pas le djihadisme ni le terrorisme qui détruit aujourd’hui la Libye. C’est une guerre civile. Une escalade est possible dans les semaines qui viennent. Cela peut déclencher des déplacements de population vers le sud de la Tunisie. Si la Tunisie est déstabilisée, l’est de l’Algérie risque d’être aussi à nouveau déstabilisé. Ce sont des effets dominos qui préoccupent les décideurs algériens".
Le contexte politique interne en Algérie explique aussi le retour diplomatique du pays sur la scène internationale et surtout sur ce dossier libyen.
Pour la première fois depuis sept ans, l'Algérie a un président qui remplit sa fonction, estiment certains analystes. Une situation favorable à cet engagement libyen, selon Seidik Abba, spécialiste des questions africaines. "Le pays, après l’élection d’un nouveau président, commence à s’intéresser à sa politique étrangère. L’Algérie est aussi de retour dans le dossier malien. Et ce n’est pas surprenant que ce contexte interne ait permis à l’Algérie de s’intéresser au dossier libyen", explique le spécialiste.
Neutralité algérienne
En outre, l’Algérie est aussi préoccupée par les risques d’une confrontation entre certaines puissances étrangères en Libye, ce qui pourrait l’affecter.
Seidik Abba estime aussi que contrairement à plusieurs pays qui tentent de trouver une issue à la crise libyenne, l’Algérie jouirait d’une certaine crédibilité en raison de sa neutralité. "L’Algérie n’a pas de parti pris et connaît tous les acteurs. Sa neutralité est un atout. L’Algérie a plus de chances d’être écoutée en Libye que la France parce que la France a un parti pris. Si vous prenez la Turquie, elle a un parti pris. Même chose pour la Russie. L’Algérie peut donc parler avec les différents protagonistes et cela est un atout important", soutient l'analyste.
L'Algérie se propose d'accueillir donc un "Forum de réconciliation nationale" entre protagonistes libyens. Pour l’instant aucune date n’a été donnée quant à la tenue de cette réunion.