Gao tombe, Tombouctou menacée
1 avril 2012Les rebelles touaregs avaient attaqué Gao hier matin. Ils l'ont conquise dans la nuit. La ville de 90.000 habitants, située à un millier de kilomètres de la capitale Bamako, abritait l'état-major des forces gouvernementales pour toute la région du Nord-Mali. Après une journée de combats à l'arme lourde autour de deux camps militaires, les forces gouvernementales ont finalement dû céder le terrain aux assaillants, après l'ordre reçu par le chef de la junte militaire au pouvoir depuis le 22 mars, le capitaine Amadou Sanogo, de "ne pas prolonger les combats".
Les rebelles disent "contrôler" la région
Ce matin, des habitants de Tombouctou affirment avoir entendu des coups de feu aux alentours de la ville. Des tirs à l'arme lourde auraient également visé le camp militaire de la ville, mais celui-ci serait vide, selon des sources locales. D'autre sources indiquent que l'armée régulière serait en train de quitter ses positions dans la zone.
Dans un communiqué, le Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA) affirme que la région est désormais sous son contrôle et que son état-major "cerne la ville de Tombouctou pour déloger le reste de l'administration politique et militaire malienne". Il appelle par ailleurs la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest à "plus de retenue" et à ne pas s'ingérer dans le conflit malien. Samedi matin en effet, le président en exercice de la Cédéao, l'Ivoirien Alassane Ouattara, a annoncé à la télévision la "mise en alerte" d'une force d'intervention régionale de 2000 hommes. "Il faut à tout prix préserver l'intégrité territoriale du Mali", a-t-il déclaré. Les rebelles du MNLA "invitent" l'organisation régionale ouest-africaine à favoriser "l'option politique en faveur de la paix".
La junte prête à des concessions
La prise des villes stratégiques du Nord affaiblit la position de la junte, qui affirmait avoir renversé le président Amadou Toumani Touré en raison de son échec à mater la rébellion touareg. Raison pour laquelle, peut-être, ils ont mis de l'eau dans leur vin en rencontrant samedi à Ouagadougou le président burkinabè Blaise Compaoré, nommé médiateur dans la crise malienne par ses pairs de la Cédéao. Les putschistes ont annoncé qu'ils allaient présenter "très vite" des propositions en vue de rendre le pouvoir aux civils.
La Cédéao a donné jusqu'à lundi aux putschistes pour rétablir l'ordre constitutionnel, faute de quoi elle instaurerait un embargo "diplomatique et financier". Concrètement, l'organisation ouest-africaine menace, en plus de fermer ses frontières au Mali, de priver le pays des fonds de la Banque centrale d'Afrique de l'Ouest et de geler les avoirs des membres de la junte qui seraient en outre interdits de voyager.
Mobilisation pour la paix à Bamako
Et à un millier de kilomètres des combats, dans la capitale Bamako, environ 25.000 personnes ont participé samedi à un grand rassemblement pour la paix, à l'appel des responsables des trois principales religions du pays. Le rassemblement s'est déroulé sans incident sous l'oeil de nombreux policiers anti-émeutes. Dans un autre stade de Bamako, quelques milliers de personnes étaient, elles, rassemblées pour soutenir la junte et clamer leur colère envers la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest et ses menaces d'embargo.
Auteur : Anne Le Touzé (avec AFP, Reuters)