Des passeurs reconvertis à Agadez
29 août 2017Face à la baisse de leurs revenus, certains passeurs ont décidé de se reconvertir, par exemple dans un club de football, comme l'ont découvert. C'est le cas de Bashir Ama. Ce dernier avait l’habitude de gagner beaucoup d’argent en faisant traverser le Sahara aux candidats à l’émigration qui voulaient rejoindre la Libye. Mais il a décidé d’arrêter et finance aujourd'hui, le plus grand club de football d'Agadez, Nassara: "C'est une équipe de passeurs, parce que moi je suis passeur. La majorité, les jeunes qui donnent l'argent ce sont des passeurs."
Un club de foot pour retenir
Huit de ses joueurs sont des migrants qui se sont retrouvés bloqués aux portes du désert. Le numéro 66, originaire de Côte d'Ivoire, a rêvé de devenir une star du football en Europe. Au lieu de cela, Mahamadu joue maintenant pour le club de Bashir. L'ancien passeur essaie d’empêcher ses joueurs de rejoindre l’Europe. Principalement parce que c'est dans son propre intérêt – après tout ce sont ses meilleurs joueurs - mais aussi parce que de plus en plus de gangs sans pitié s'emparent de l'activité de traite humaine au Niger dit-il. "Maintenant la route est bloquée, donc y'a des passeurs qui font ce travail, ils suivent les nouvelles routes, c'est très dangereux."
Les passeurs d'Agadez ont toujours travaillé dans des limbes juridiques
Mais beaucoup, comme Bashir, étaient des hommes d'affaires réputés. Il y a environ deux ans, l'Europe a exhorté le Niger à adopter une loi contre les trafics de personnes, avec de lourdes amendes à la clé. Si les passeurs dits traditionels ont arrêté les trafics, de nouveaux gangs ont pris le relais. On estime qu'environ 5 000 migrants sont morts dans le désert rien que cette année !
Ils ont été enlevés ou abandonnés par les trafiquants. Bashi va à la rencontre de migrants coincés ici depuis des mois, faute d'argent pour poursuivre leur voyage. Mais rien ne semble les dissuader d’atteindre leur but, comme le dit ce jeune Malien. "Ma destination c'est d'aller en Europe, quelqu'en soient les difficultés, quelqu'en soit tout. Je n'ai pas peur, la mort ce n'est qu'une seule fois."
Bashir, lui, a trouvé un footballeur potentiel originaire de Côte d'Ivoire et l'invite à faire des essais. Il devra prouver qu'il a assez de talent pour jouer en deuxième division nigérienne. Et surtout, montrer qu'il est prêt, pour l’instant, à renoncer à son rêve d'Europe.