Les céréales ukrainiennes ciblées par la Russie
3 août 2023Les frappes sur le port d’Ismajil avaient pour cible des entrepôts de céréales. La ville se trouve près de la frontière avec la Roumanie. Une enquête a été annoncée par le procureur général d'Ismaji car l'Ukraine estime que viser des infrastructures civiles pourrait constituer un crime de guerre.
Mais le conflit sur les céréales entre l'Ukraine et la Russie se déroule aussi sur la scène internationale : il y a deux semaines, la Russie avait suspendu l'accord céréalier passé avec l'Ukraine l'année dernière. L'accord entre les deux pays en guerre avait permis d'exporter presque 33 millions de tonnes de céréales, notamment à destination de pays d'Afrique du nord ou de la Corne de l'Afrique. La Russie et l'Ukraine figurent parmi les plus gros exportateurs de blé au monde.
L'instrumentalisation des céréales dans la guerre russo-ukrainienne
Lors du récent sommet Russie-Afrique, les autorités russes ont promis de s'engager pour la sécurité alimentaire du continent africain et offert à six Etats jusqu'à 50.000 tonnes de céréales. Ces mêmes autorités russes bombardent dans le même temps des ports ukrainiens dans la région d'Odessa, comme celui de Reni. Or, ces ports sont devenus la nouvelle voie de sortie principale des produits agricoles ukrainiens depuis la suspension de l'accord par la Russie. Dans une lettre aux ministres des affaires étrangères du G20, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrel, a condamné l'instrumentalisation des céréales dans ce conflit. Il s'agirait d'une politique cynique dans laquelle la nourriture est délibérément utilisée comme une arme pour créer de nouvelles dépendances.
La Turquie entre l'Occident et la Russie
Pour continuer à pouvoir exporter les céréales russes en transitant par la Mer noire, le Kremlin tente de s'appuyer sur la Turquie. Mais son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, a demandé hier, au téléphone, à Vladimir Poutine de ne prendre aucun risque afin d'éviter toute nouvelle escalade.
La Turquie joue un rôle de médiateur entre l'Occident et la Russie. C'est Ankara qui, avec l'Onu, a permis la négociation de l'accord céréalier de 2022. Cependant, Recep Tayyip Erdogan reste pragmatique : il ne veut briser ses liens avec aucune des deux parties. D'un côté, la Turquie a appliqué les sanctions contre la Russie, suite à l'invasion de l'UKraine, avec des réticences ouvertes, mais de l'autre, elle condamne officiellement la guerre commencée par la Russie et, en tant que membre de l'Otan, elle ne s'est pas désolidarisée de la position de l'Occident.