Ces mercenaires qui ne partent pas de la Libye
10 mai 2021Les ministres européens des Affaires étrangères se réunissent ce lundi [10.05.21]. Parmi les thèmes qui reviennent depuis des années sur la table : la situation en Libye. Le Conseil de sécurité des Nations unies réclame le retrait de tous les mercenaires du pays – ils seraient plus de 20.000 sur le territoire - en majorité des Russes, des Syriens et des Soudanais - qui seraient autant d'entraves à un retour à la paix. Mais alors, à qui profite la présence de ces mercenaires ?
Un cessez-le-feu depuis novembre 2020
En 2020, les combats font rage en Libye. De nombreux civils et des hommes en armes meurent dans les violences... et certains ne sont pas des Libyens mais des mercenaires étrangers venus se battre pour de l'argent en Libye.
>>> A lire aussi : Libye : l'UE appelle au départ des mercenaires étrangers
Quinze mois plus tard, les combats ne sont plus omniprésents sur le terrain. Et les responsables politiques ne parlent plus de guerre, mais d'une paix prochaine, à l'instar du Premier ministre russe Mikhail Michoustine qui affirme que "la Russie a toujours soutenu la souveraineté et l'intégrité de la Libye. Nous espérons une feuille de route prochaine pour un retour de la paix à laquelle tous les acteurs politiques pourront œuvrer."
Afflux de mercenaires
Le renversement de Mouammar Kadhafi en 2011 a été le coup de grâce pour la stabilité en Libye. Depuis, plusieurs puissances s'y affrontent dans une guerre par procuration.
>>> A lire aussi : Il y a dix ans, une pluie de bombes sur la Libye
La Russie et la Turquie y rivalisent pour asseoir ou maintenir leur pouvoir dans le bassin Méditerranéen. Vladimir Poutine a fait le choix du maréchal Haftar, à la tête d'un groupe armé parti en rébellion depuis l'Est de la Libye. Tandis que Recep Tayyip Erdogan a pris le parti du gouvernement national reconnu par l'ONU.
Depuis octobre 2020, un cessez-le-feu fragile se maintient, qui devait permettre, selon les Nations unies le retrait des mercenaires.
Mercenaire... un instrument qui se vend
Ce qui est certain, c'est que l'engagement comme mercenaire en Libye peut être lucratif : le groupe russe Wagner réclamerait jusqu'à 175 millions de dollars pour trois mois d'interventions. Les mercenaires arabes, eux, gagneraient entre 800 et 1200 dollars américains.
>>> A lire aussi : 10 ans après la révolution en Libye, l'espoir reste permis
13.000 Syriens seraient en Libye, ceux qui viennent de la région de Damas, fief de Bachar al-Assad, sont employés par la Russie. Ceux qui sont originaires du nord sont payés par la Turquie. Sean McFate, expert militaire de la chaîne ABC explique que les mercenaires ne font que remplir le contrat qu'ils ont signé : "Les mercenaires n'ont pas besoin d'être cruels, comme ceux qu'on voit dans les films hollywoodiens. Ils savent se servir d'un générateur quand il le faut mais aussi mettre le feu à ta maison. Ils peuvent donner un coup de main pour une intervention humanitaire ou se rendre coupables des pires atrocités. Les mercenaires, ce sont de simples instruments."
Des instruments bien pratiques puisqu'ils ne s'encombrent ni du droit de la guerre ni du droit humanitaire.
>>> A lire aussi : Ce qu'il reste du "printemps arabe" en Afrique, dix ans après
Au lieu de répondre à l'appel de l'ONU au retrait des mercenaires de Libye, la Turquie y aurait envoyé ces dernières semaines 380 mercenaires supplémentaires.
Malgré la situation encore instable, le 7 mai dernier, les ambassades de France, d'Allemagne, d'Italie, du Royaume-Uni et des États-Unis à Tripoli ont appelé la Libye à respecter la date des élections législatives et présidentielle. Ces scrutins sont prévus le 24 décembre prochain.