CAN 2021 : la Sierra Leone exploite enfin son potentiel
19 janvier 2022La Coupe d'Afrique des nations livre toujours son lot de surprises. Cette année, la Sierra Leone est l'une des plus remarquables.
"En 2019, la Sierra Leone était suspendue et n'avait donc pas pu jouer la compétition. Cette génération n'a, aussi, pas pu la disputer en 2017. Finalement, c'est la première fois depuis Ebola que l'équipe a de nouveau une opportunité. Et ils sont proches de la qualification pour les huitièmes de finale", explique Tom Legg, ancien directeur de la performance au sein des Leone Stars, au micro de la DW.
Le trouble-fête dans le groupe de la mort
Après un superbe match nul face au tenant du titre, l'Algérie - notamment grâce à la performance du gardien Mohammed Kamara -, la Sierra Leone est revenue deux fois au score pour accrocher un autre favori du tournoi : la Côte d'Ivoire. Kamara a de nouveau été un des grands artisans de cette performance en arrêtant un pénalty de Franck Kessié lors de la première mi-temps.
Le but de l'égalisation, marqué à la 93è minute de jeu, est pour l'instant un des moments les plus forts du tournoi. Alors que l'horloge était sur le point de s'arrêter, le portier ivoirien Badra Ali Sangaré a commis une erreur qui a profité à Steven Caulker, puis à Alhaji Kamara, qui a fini par marquer après avoir raté sa première occasion.
"En tant que personne qui les connaît et qui a passé beaucoup de temps avec eux, c'est super de les voir faire ce qu'ils font au Cameroun", assure Legg. "Je suis ravi pour eux."
Une série d'obstacles liée à l'histoire
L'équipe de Sierra Leone est avant tout un collectif. Pour la première fois depuis 1996, les Leone Stars sont présents à la CAN. La guerre civile puis le virus Ebola ont plongé le pays dans de grandes difficultés qui ont évidemment eu des conséquences sur le développement du football.
"C'est comme s'il y avait quelque chose qui habitait les joueurs de cette équipe et lui permettait d'atteindre des sommets inespérés", affirme Legg.
"Je pense notamment à l'épidémie Ebola qui a frappé l'Afrique de l'Ouest. Quand vous avez une crise sanitaire et humanitaire, il est difficile pour les joueurs de se déplacer. Tout à coup, nous devions jouer nos matchs à domicile en dehors de Freetown, en dehors du pays", explique Legg.
"En Europe, c'est déjà difficile de ne pas jouer à domicile mais en Afrique, quand on sait à quel point la logistique est difficile, c'est un vrai handicap et cela affaiblit l'équipe".
Pour l'ancien membre de l'encadrement, la génération de 2012 aurait pu se qualifier pour la CAN et peut-être même pour la Coupe du monde si les événements extérieurs n'avaient pas joué en sa défaveur.
Au cours de l'année 2014, la Sierra Leone avait même atteint le 50è rang au classement FIFA, soit le meilleur rang de son histoire.
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Stabilité et expérience, la recette qui fonctionne
Avant le tournoi, la Sierre Leone restait sur une défaite face aux Comores en novembre dernier. Mais au Cameroun, une génération qui n'a jamais eu sa chance espère mener les Leone Stars le plus loin possible.
Âgé de 34 ans, le capitaine Umaru Bangura ainsi que John Kamara (33 ans) et Kei Kamara (37 ans) sont au cœur de cette équipe pour peut-être la dernière fois. Ils passeront ensuite le flambeau à la génération de Kwame Quee (25 ans).
"John Keister, comme son prédécesseur John McKinstry, insuffle une certaine stabilité et un certain calme. De fait, la somme de talents qui existe en Sierra Leone est alors capable de fonctionner en tant que collectif, ce qui lui permet actuellement d'évoluer au meilleur niveau du football africain", estime Legg.
Pour une nation qui a tant souffert, cette compétition représente beaucoup de choses. La preuve : après le match nul face à la Côte d'Ivoire, les rues de la capitale Freetown ont été envahies de supporters fêtant avec joie ce résultat qui semblait encore impossible il y a quelques années.
*Cet article a été adapté et traduit par Sophie Serbini